Dossier réalisé par le Docteur Jean-Philippe Madiou, journaliste scientifique

En plus du contrôle de la glycémie, la prise en charge du diabète nécessite de contrôler d’autres paramètres importants qu’il s’agisse du surpoids, du risque cardiovasculaire ou des membres inférieurs (artérite, complications du pied diabétique…), de l’évolution vers une atteinte rénale ou une atteinte oculaire (rétinopathies). Voici, en quelques questions/réponses simples, l’essentiel à savoir sur ces complications et les moyens de réduire leur risque de survenue, avec des interviews de médecins spécialistes (cardiologues, diabétologues, néphrologue…).

Sommaire :

  1. Pourquoi lutter contre le surpoids ?
  2. Le diabète expose-t-il à un risque accru de maladies cardiovasculaires ?
  3. Que signifie le terme de « pied diabétique » ?
  4. Complications rénales et diabète…
  5. Pourquoi un diabétique doit-il consulter régulièrement un ophtalmologiste ?

1) Pourquoi lutter contre le surpoids ?

La lutte contre le surpoids et l’obésité est la 1re étape du traitement du patient diabétique. Le surpoids et le diabète sont en effet intimement liés et la plupart des diabétiques de type 2 souffrent d’obésité ou de surpoids, qui agissent comme des « déclencheurs ». Les personnes en surpoids ont 5 fois plus de risque de devenir diabétiques de type 2 en comparaison de celles avec une corpulence normale et jusqu’à 10 fois en cas d’obésité. La graisse au niveau de l’abdomen – ou obésité abdominale – indique qu’un excès de graisse est stocké au niveau du foie, qui va être à l’origine du développement d’une résistance à l’insuline et d’une carence à l’insuline qui s’aggravent au fil du temps. Cette obésité abdominale devient un véritable facteur de risque quand le tour de taille dépasse 102 cm chez les hommes et 88 cm pour les femmes. Le surpoids augmente aussi fortement le risque de complications chez les diabétiques, non seulement en termes de mauvais équilibre de la glycémie mais aussi d’élévation des taux de cholestérol et d’hypertension artérielle.

Comment lutter ? Mettre en place une alimentation équilibrée et une activité physique régulière :

  • Des règles diététiques saines et équilibrées : ne pas sauter de repas et éviter le grignotage, avoir des apports alimentaires réguliers d’un jour à l’autre, répartir les apports en glucides (sucres) sur l’ensemble de la journée, consommer des fibres (légumes, fruits) qui permettent, en plus d’un bon transit intestinal, de ralentir l’absorption des sucres et des graisses (cholestérol).
  • Une activité physique régulière – un incontournable pour agir à la fois contre les kilos et optimiser le contrôle de la glycémie : marche – 20 minutes matin et soir, pratique d’un sport ou gymnastique, natation, vélo… 
  • Le médecin traitant et le diabétologue peuvent vous donner des conseils adaptés, voire vous conseiller de consulter des spécialistes de l’alimentation (diététicien(ne), nutritionniste…).

2) Le diabète expose-t-il à un risque accru de maladies cardiovasculaires ?

Le risque d’avoir une maladie cardiovasculaire, qu’il s’agisse d’un infarctus du myocarde (maladie des coronaires ou artères du cœur), d’un accident vasculaire cérébral (« attaque » cérébrale) est multiplié par 2 chez un diabétique. Celui d’une artérite des membres inférieurs, ou artères des jambes qui se bouchent progressivement est également plus élevé et peut conduire à des amputations (orteils, mais aussi au niveau de la jambe ou de la cuisse) ou la nécessité de pontages pour prendre le relais des artères obstruées. Ces maladies cardiaques sont les complications les plus importantes associées au diabète et le risque est d’autant plus élevé qu’il existe une élévation de la pression artérielle (hypertension artérielle), du « mauvais » cholestérol (LDL-cholestérol), une obésité, un manque d’activité physique régulière et bien sûr un tabagisme.

Comment réduire ce risque ?

  • Adopter une bonne hygiène de vie avec une alimentation équilibrée ni trop grasse, ni trop sucrée ou salée et une activité physique régulière, perdre du poids.
  • Prendre son traitement, qu’il s’agisse du traitement antidiabétique, du traitement contre l’hypertension si cela est nécessaire, ou diminuer son cholestérol si le régime ne suffit pas. 
  • Chez les personnes qui ont déjà eu un problème cardiaque, il est parfois nécessaire de « fluidifier » le sang (anticoagulant, anti-agrégant plaquettaire qui empêche les plaquettes de se lier entre elles et de provoquer des caillots), de prendre certains médicaments anti-cholestérol (statines) qui ont démontré leur efficacité dans ce cas et aussi certains traitements du diabète qui ont montré qu’ils étaient plus efficaces que d’autres pour éviter le risque de récidive.
  • Consulter régulièrement son médecin traitant (contrôle de l’état de santé, prises de sang pour vérifier le taux de sucre, les lipides dans le sang et le fonctionnement du rein, par exemple) et son diabétologue le cas échéant (particulièrement utile quand il faut changer ou adapter le traitement contre le diabète) et aussi consulter un cardiologue une fois par an : ce dernier jugera s’il est nécessaire de passer un électrocardiogramme, voire une échographie cardiaque ou un test d’effort car certaines maladies cardiaques sont « silencieuses » et peuvent parfois débuter sans que l’on s’en rende compte (on peut très bien avoir fait un infarctus sans le savoir). Il pourra également décider de contrôler l’état des artères par un écho-doppler artériel des membres inférieurs ou des carotides…

Pour en savoir plus, https://www.diabete.fr/prendre-mon-diabete-a-coeur/


3) Que signifie le terme de « pied diabétique » ?

Les atteintes podologiques (appelées « pied diabétique ») sont fréquentes chez les personnes atteintes de diabète avec un risque multiplié par 5 de présenter une plaie comparativement à la population générale. Ces atteintes podologiques sont liées à plusieurs mécanismes, neurologiques (« neuropathie »), vasculaires (artériopathie des membres inférieurs, insuffisance veineuse) et/ou infectieux plus ou moins associés. La neuropathie est due à un diabète mal équilibré et prédomine au niveau des membres inférieurs (elle commence par les pieds). Elle peut être aggravée par l’alcool. Plusieurs grades d’atteinte podologique ont été définis et permettent d’avoir une idée du niveau de risque auquel est exposé le patient.

Les grades du risque podologique

Comment réduire ce risque ?

  • La prévention demeure l’élément essentiel :
    • équilibrer au mieux son diabète et contrôler les facteurs de risque (tabac, hypertension artérielle, cholestérol) ;
    • avoir un chaussage adapté et non traumatisant, éviter les macérations et les soins traumatiques (ciseaux, bistouri…).
  • Toute plaie du pied peut évoluer rapidement et défavorablement : c’est une urgence et il faut consulter au plus vite son médecin traitant ou le centre si vous bénéficiez d’un suivi spécialisé.
  • Il est important de connaître son risque (grade) afin de pouvoir cibler au mieux sa prise en charge et éviter les complications. L’hôpital Lariboisière a développé un outil spécifique pour vous y aider : le Pédimémo.
  • En cas de neuropathie, les pieds sont plus fragiles et si une déformation ou une atteinte vasculaire sont présentes, il faut un suivi spécialisé et des soins de pédicurie* réguliers. 

*en cas de diabète, la Sécurité Sociale rembourse jusqu’à 4 séances/an auprès d’un pédicure-podologue conventionné.

Pour en savoir plus, https://www.diabete.fr/connaitre-son-risque-podologique-quand-on-a-un-diabete/


4) Complications rénales et diabète…

Le diabète peut entraîner des atteintes des petits vaisseaux (« microangiopathie ») par excès de sucre dans le sang au niveau des reins. Le rein est un organe chargé de fabriquer l’urine en filtrant le sang : le diabète peut altérer la paroi des petits capteurs du rein, qui n’est alors plus capable d’éliminer les déchets s’accumulant dans l’organisme ce qui provoque une augmentation de la pression artérielle. Les urines vont aussi se charger de molécules – notamment l’albumine – et le premier signe d’une atteinte rénale est la présence d’albumine dans les urines, au départ en faible quantité (« micro-albuminurie »). 

L’atteinte du rein ou « néphropathie diabétique » évolue ainsi en plusieurs stades :

  • apparition d’une micro-albuminurie ou néphropathie débutante (30 à 300 milligrammes par 24 heures et confirmée par 3 mesures successives) ;
  • néphropathie clinique avec micro-albuminurie supérieure à 300 milligrammes par 24 heures ou présence de protéines dans les urines (> 0,5 gramme par 24 heures) ;
  • un dernier stade, l’insuffisance rénale sévère qui nécessite alors la mise en place de dialyses (épuration artificielle du sang).

La néphropathie diabétique apparaît généralement entre la 15e et la 25e année de la maladie diabétique mais la présence d’albumine dans les urines est un indicateur précieux de risque de développer des maladies rénales et/ou cardiaques. 

Comment réduire ce risque ?

  • La prise en charge consiste à maintenir une glycémie normale et une tension artérielle inférieure à 130/80 mmHg,
  • Il faut également dépister la néphropathie le plus précocement possible, grâce à des dosages répétés de l’albumine dans les urines. 

5) Pourquoi un diabétique doit-il consulter régulièrement un ophtalmologiste ?

Le diabète est responsable d’une altération des petits vaisseaux capillaires (« microangiopathie ») de l’ensemble du corps, y compris ceux qui sont chargés de l’irrigation de l’œil. L’excès de sucre (hyperglycémie) fragilise en effet la paroi des capillaires et, au niveau de la rétine par exemple, les vaisseaux qui l’irriguent vont éclater et des zones de cette membrane nécessaires à la vision ne reçoivent plus d’oxygène. En réaction, la rétine fabrique de nouveaux vaisseaux qui colonisent le centre de la rétine (la « macula »). Celle-ci va alors s’épaissir et former un œdème maculaire (œdème maculaire diabétique) qui entraîne une baisse de l’acuité visuelle. Ces vaisseaux produits par la rétine peuvent eux-mêmes se mettre à saigner, avec une perte de la vision. Il existe également un risque de décollement de rétine, complication gravissime qui peut engendrer une perte permanente de la vision. L’ensemble de ces complications constitue la « rétinopathie diabétique » qui est la complication la plus redoutée du diabète : présente chez 50 % des diabétiques de type 2 et 1re cause de cécité chez les plus de 65 ans en France.


La rétinopathie diabétique évolue en 2 étapes :

  • la première est considérée comme simple et demeure réversible ;
  • la deuxième est caractérisée par des lésions permanentes (rétinopathie proliférante) et, en l’absence de traitement, les patients peuvent devenir aveugles.

Elle peut également favoriser l’apparition d’autres maladies de l’œil comme la cataracte (opacification du cristallin) qui diminue fortement la vision.


Comment réduire ce risque ?

  • La rétinopathie se développe de façon silencieuse et souvent, le patient ne se rend compte de rien,
  • La prévention est le meilleur moyen de lutte : il faut faire attention à avoir une glycémie mais aussi une tension artérielle bien normalisées sous traitement ; 
  • Le dépistage annuel chez l’ophtalmologiste est nécessaire et indispensable : le spécialiste réalisera une mesure de la vision (acuité visuelle), de la vision des couleurs et un fond d’œil,
  • dans certains cas, il faudra faire un traitement par laser (photocoagulation) qui permettra de traiter certaines lésions et de préserver la vision ;
  • dans certains cas, des injections de médicaments peuvent être faites directement à l’intérieur de l’œil (injections intra-vitréennes) : l’injection se fait avec une aiguille très fine dans le « blanc de l’œil » et ne dure que quelques secondes. Elle se fait à un endroit où l’on peut pénétrer dans l’œil, préalablement anesthésié, sans danger pour les structures oculaires et permet d’injecter du produit dans la cavité oculaire située en arrière du cristallin (cavité vitréenne).